Revista crítica de Derecho Canónico Pluriconfesional / Rivista critica di diritto canonico molticonfessionale
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Paix de Dieu, protection des pèlerins et le pèlerinage punitif : des vraies sanctions ou même une protection des criminels ?
Thomas GERGEN*
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Thomas Gergen (2015): “Paix de dieu, protection des pèlerins et le pèlerinage punitif: des vrais sanctions ou même une protection des criminels?”, en Revista crítica de Derecho Canónico Pluriconfesional, n. 2 (febrero de 2015), pp. 165-174.
Résumé : La Pax et Treuga Dei concernait aussi les pèlerins en route pour les lieux de pèlerinage : les pèlerins « traditionnels »1 et ceux qui avaient été condamnés à partir en pèlerinage pour ne pas avoir respecté le règlement de la Paix de Dieu dans leur propre pays. Ces derniers étaient très libres, liberté dont quelques-uns ont su bien profiter. Par rapport aux pèlerins volontaires et aux autres délinquants, ils étaient même favorisés.
Mots-clé : Pèlerin, Paix de Dieu, Droit pénal, Miracle punitif.
Zusammenfassung : Die Gottesfriedensbewegung gewährte auch den Pilgern Schutz, um heil an ihr Ziel zu gelangen. Es waren dies zunächst die konventionellen, traditionellen Pilger. Zudenken ist aber auch ferner an die, die zu einer Pilgerfahrt verurteilt waren. Sie wurden in die Freiheit entlassen. Der Pilgerschutz blieb ihnen ebensowenig versagt.
Schlüsselwörter : Pilger, Gottesfrieden, Strafrecht, Strafwunder.
La Paix de Dieu était une institution médiévale aux divers aspects. Venant d'Aquitaine elle s'étendait à la péninsule Ibérique à partir du XIe siècle et fut proclamée le 20 avril 1124 en Galice lors du concile de Saint Jacques de Compostelle2. Le mouvement de la Pax et Treuga Dei se fixait pour but de restaurer l'ordre de paix en protégeant certains groupes faibles et défavorisés, bref les inermes, ou autrement dit les non-armés.
Aussi cette institution concernait-elle les pèlerins en route pour les lieux de pèlerinage3. Or, il y avait à distinguer deux sortes de pèlerins : les voyageurs privilégiés « traditionnels »4 et ceux qui avaient été condamnés à partir en pèlerinage pour ne pas avoir respecté le règlement de la Paix de Dieu dans leur propre pays.
Depuis le premier concile de Latran de l'an 1123 la législation et la juridiction ecclésiastiques garantissaient la sécurité des pèlerins5. Selon les Usages de Barcelone (Usatges de Barcelona) les pèlerins bénéficiaient aussi d'une paix particulière6. La Paix de Dieu constituait donc un moyen de défendre les pèlerins contre les pilleurs et les autres criminels.
Mais le deuxième groupe de « pèlerins » est à prendre en considération d'une manière plus exacte : le second concile de Latran en 1139 condamnait les incendiaires et leurs complices à un pèlerinage d'une année soit à Jérusalem, soit en Espagne7.
L'acte contre les incendiaires (Brandstifterbrief) de Frédéric I en 1186 prévoyait également le pèlerinage à Jérusalem ou Saint Jacques de Compostelle en tant que sanction8. Par conséquent, les criminels devenus pèlerins par mesure punitive pouvaient aussi invoquer ladite sécurité du statut de pèlerin bien qu'ils n'eussent pas justement respecté la Paix de Dieu auparavant. Avons-nous affaire avec une contradiction, voire un renversement de l'intention et l'esprit de la Paix de Dieu?
Ces idées nous amènent à réfléchir, dans un premier temps, sur la notion de la Paix de Dieu en tant que garante de la sécurité des pèlerins et moteur du pèlerinage à Saint Jacques de Compostelle (mais aussi à d'autres lieus de la chrétienté). Ensuite nous nous intéresserons à une éventuelle contradiction du statut de pèlerin ; cette petite partie portera le titre : la Paix de Dieu en faveur des pèlerins : défense de ses propres adversaires ?
1. La Paix de Dieu : garante de la sécurité des pèlerins
La Paix de Dieu était une institution établie par l’Église, dans le but primordial de restreindre les vengeances et les guerres privées. C’est le concile de Charroux en 989 qui la décréta pour la première fois. Elle protégeait les clercs, les femmes, les enfants, les marchands ainsi que les pèlerins des guerres privées.
La protection spéciale du groupe des pèlerins est connue à compter du XIe siècle, depuis que des mouvements de pèlerinage se sont mis en route. Il est inutile d'analyser en détail les attaques que les pèlerins ont dues subir durant leur long chemin. Le Liber Sancti Jacobi en cite de nombreux exemples et de miracles punitifs (« Strafwunder ») pour admonester d'emblée les voleurs et cambrioleurs et les faire omettre leurs mœurs9.
Par quels moyens juridiques se concrétise cette protection ? Nous trouvons des traces dans les canons de la Paix et Trêve de Dieu et leur application et suite à une réception dans le droit coutumier et canonique. Etudions, à titre exemplaire, chaque source, l'une après l'autre.
2. Protection en faveur des pèlerins de Rome
Voici un exemple bien connu pour une telle mesure particulière de protection 10. Dans sa lettre l’évêque d’Arras Lambert (1093-1115) a porté plainte auprès de la comtesse Clementia de Flandres parce que plusieurs pèlerins pour Rome, venant de paroisses de son diocèse, se sont fait attaqués et volés, lors de leur retour dans l’évêché, par le praepositus G.11, donc un noble qui a largement outrepassé ses compétences. En tant que juge, l’évêque a excommunié le délinquant et a demandé la comtesse qu’elle rende justice selon la paix, ce qui veut dire selon les règles de la Paix de Dieu et du statut spécial de protection des pèlerins (secundum pacem). Au cas où les biens des pèlerins ne seraient plus rendus, l’évêque devrait statuta pacis excommunier le château du criminel en question, le praepositus G.
Ce cas démontre bien que l'état de choses, alors le vol des pèlerins retournant de Rome, se qualifie d’un non-respect de la paix, ce qui engendre l’intervention de deux branches de justice, l’ecclésiastique (l’évêque) et la temporelle (la comtesse). La jurisprudence prononcée en faveur des pèlerins se base donc sur la Paix de Dieu qui vient aider les victimes de revendiquer leurs biens du criminel praepositus G.
3. Privilège d'enterrement
Quand au concile de Limoges de 1031, l'interdit fut lancé sur la terre du diocèse de Limoges par l'excommunication publique, les pèlerins bénéficiaient d'une exception pour l'ensevelissement. Personne, sauf les clercs, les mendiants, les pèlerins qui arrivent, les enfants en dessous de deux ans, ne serait enseveli dans tout Limoges, et personne ne serait porté dans un autre évêché pour être enseveli12. Le statut de pèlerin a donc donné un privilège envers les autres groupes sociaux dans le diocèse de Limoges.
4. Intervention de la papauté
En 1059, Nicolas II proclama, lors du synode de Latran13, une Paix de Dieu générale pour clercs, femmes, les inermes pauperes et les pèlerins. La Trêve a été déjà reçue à cette époque, et devrait être respectée de la manière comme les princes de l’Église le fixaient et stipulaient. La collection du droit canonique d'Yves de Chartres (Panormia, livre V), se dirigeant aux pèlerins (Illi qui peregrinos) transmet le décret du pape Nicolas, can. 1614:
Illi qui peregrinos vel oratores cujuscunque sancti, sive clericos, sive monachos, vel feminas aut inermes pauperes depraedati fuerint, vel bona eorum rapuerint, vel in malum eis obviaverint, anathematis vinculo feriantur, nisi digne emendaverint. Pax vero illa quam treugam olim dicimus sic observetur, sicut ab archiepiscopis, episcopis unicujusque provinciae constituta est. Qui autem eam infregerit, excommunicationi subjiciatur. Haec igitur hujusmodi quidquid in sacris canonibus habetur authenticum sancta praefata synodus fore censuit observandum.
Cette paix est ensuite rentrée dans le Décret de Gratien : c. 25, C. 24, q. 3 15 et faisait dorénavant partie du Corpus Iuris Canonici.
5. Protection spéciale en faveur des commerçants, des pèlerins et des croisés
Dans les Consuetudines et iusticie de 1091 le duc est le protecteur des étrangers et des pèlerins. Ceux-ci et les commerçants ont été déjà mis sous la protection de l’Eglise moyennant une Paix de Dieu particulière (« Sonderfriede ») de 104216. Le synode de Soissons à Saint-Médard tenu par l’archevêque Rainald I de Reims (1083-21 janvier 1096) fit bénéficier de la Paix, outre les clercs et les femmes aussi les commerçants et les pèlerins17.
En 1095 le synode Clermont proclama une protection des pèlerins et des croisés18. Il s’avère que les croisés perturbant souvent la paix, ont été mis hors du pays afin de la restaurer dans le propre évêché19.
6. Reims 1119 : « pacem habeant : peregrini »
Voici le passage textuel du concile de Reims tenu en 1119 qui contient une réglementation typique d'une Trêve de Dieu, à savoir le respect de la paix pendant certaines périodes liturgiques, de l'Avent jusqu'à l'Epiphanie, du carême jusqu'à Pentecôte ainsi que des vigiles de certains saints et fêtes de la Vierge, des synodes :
In concilio Remensi decrevit domnus papa Calixtus de trevia dei sic :
Ab adventu domini usque ad octavas epiphaniae observari treviam dei. A quinquagesima usque ad octavas pentecostes. Similiter et in ieiuniis quattuor-temporum, in vigilis sanctorum, quae ieiunantur, et in festis eorumdem, in duabus synodis a dominica in dominicam, in omnibus festis sanctae Mariae. His temporibus aequaliter omnes pacem habeant. Et monachi, et bona eorum, et mulieres, et comitatus earum, omni tempore pacem habeant. Mercatores, venatores, « peregrini », similiter.
Cette concile lie la paix également à des zones spéciales (les aîtres) qui bénéficient de la paix: Atria omni tempore in pace sint…20.
7. Le concile de Clermont de 1130
Le canon X du concile de Clermont énumère également un certain nombre de groupes qui tiennent à cœur à la paix publique21 :
« Ut clerici, monachi, peregrini, mercatores et agricolae semper sint securi. Praecipimus etiam, ut presbyteri, clerici monachi, peregrini, et mercatores, rustici euntes et redeuntes, et in agricultura persistentes, et animalia cum quibus arant, et oves, omni tempori sint securi ».
Le même concile, dans son canon XVII, a déclaré le statut de pèlerinage en tant que peine qui suit un crime, à savoir pour l’incendiaire22 :
« De incendiariis.
Pessimam siquidem et depopulatricem et horrendam incendiariorum malitiam auctoritate dei et beatorum apostolorum Petri et Pauli omnino detestamur et interdicimus. Haec etenim pestis, haec hostilis vastitas, omnes alias depraedationes exsuperat : quae auantum populo dei sit damnosa, quantumque detrimentum animabus et corporibus inferat, nullus ignorat.
Assurgendum est igitur et omnimodis laborandum, ut tanta clades, tantaque pernicies pro salute populi eradicetur et extirpetur. Si quis igitur post huius nostrae prohibitionis promulgationem malo studio, sive pro odio, sive pro vindicta, ignes apposuerit vel apponi fecerit, aut appositoribus consilium vel auxilium scienter tribuerit, excommunicetur. Et si in hoc mortuus fuerit incendiarius, christianorum careat sepultura, nec absolvatur nisi prius damno, cui intulit, secundum facultatem suam resarcito, iuret se ulterius ignem non appositurum. Poenitentia autem ei detur, ut in Hierosolymis aut in Hispania in servitio dei per integrum annum permaneat… ».
8. Le concile de Reims datant de 1148
Le concile de Reims de 1148 a prévu la même structure que le précédent de 1119 au même lieu. Car nous trouvons d’abord la protection spéciale des pèlerins ; le statut de pèlerin acquiert, de surplus, qui a commis un incendie. Analysons les sources.
Le canon XI accorde aux pèlerins leur immunité en tant que tels 23 :
« Ut ecclesiasticae et regulares, sed et saeculares personae in via, in agro, et eorum animalia, omni tempore sint securae. Praecipimus quoque, ut presbyteri, clerici, monachi, conversi, peregrini, mercatores, rustici, euntes et redeuntes et in agricultura existentes, et animalia cum quibus arant, et oves omni tempore sint securae.
Si quis autem hoc nostrum statutum violare praesumpserit : episcopus in cuius parochia fuerit, omni trepiditate seposita, canonicam de ipso iustitiam faciat. »
Le canon XV « De incendiariis » répète la peine de devoir partir en pèlerinage pour une année entière24 :
« Innovamus etiam, ut si quis malo studio, sive pro odio, sive pro vindicta, ignem apposuerit, vel apponi fecerit, aut appositoribus consilium vel auxilium scienter tribuerit, excommunicetur.
Et si mortuus fuerit incendiarius, Christianorum careat sepultura. Nec absolvatur, nisi prius damno cui intulit, secundum facultatem suam resarcito, iuret se ulterius ignem non appositurum. Poenitentia ei detur, ut in Hierosolymis aut in Hispania in servitio dei annum permaneat… »
9. La paix du Roi en 1155
Dans la paix de Louis VII nous ne trouvons pas explicitement mentionnés les pèlerins ; comme ils sont chemin faisant ils font partie de la paix de chemins, donc de la paix particulière (« objektiver Sonderfriede ») : « …asecuritatis caminis… »
Nous citons le paragraphe en cause25 :
« …Ex quorum beneplacito ordinavimus a veniente pascha ad decem annos, ut omnes ecclesiae regni, et earum universae possessiones, et omnes agricolae, armenta similiter et greges, et assecuritatis caminis, omnes ubique mercatores, et homines quicumque sint, quamdiu parati fuerint ad iustitiam stare ante eos, per quos iustitiam facere debuerint, omnes omnino pacem habeant et plenam securitatem… »
Une garantie d'obtenir la justice est prononcée ainsi que le droit d'être écouté devant la justice. En outre, le 25 octobre 1157, l’archevêque Samson de Reims, renouvela la Paix de Dieu, cinq ans après la Pax Regis de Louis VII26.
10. Le concile de Montpellier en 1195 et la protection dans le droit coutumier médiéval
A Montpellier (« Ipse legatus, de assensu omnium, universa quae sequuntur, ita instituit »), fut décidé le suivant27 :
« …Rursus saepe dictus legatus statutis adiecit, ut omnes presbyteri, clerici, monachi, scholares, conversi, peregrini, mercatores, rustici euntes et redeuntes et in agricultura existentes, et animalia quibus arant et quae portant semen ad agrum, iuxta decretum eiusdem domini Alexandri congrua securitate laetentur…
Ad haec, secundum constitutionem Nicolai papae consequenter instituit, ut illi qui peregrinos vel oratores cuiuscumque sancti, sive clericos, sive monachos, vel feminas, aut inermes pauperes fuerint depraedati, vel bona eorum rapuerint, vel in malum eis obviaverint, nisi digne emendaverint, anathematis vinculo innodentur. Et qui treugam sive pacem infregerit, servatis omnibus supradictis excommunicationi subdatur. »
Servent comme exemple pour la réception de l’idée de doter les pèlerins d’une immunité les Usages de Barcelone ; le paragraphe LV est selon Rovira i Ermengol, mais selon la numérotation de Bastardas i Parera c’est l’usage no. 60 28 ; il s’agit là d’une réception des textes de concile de Barcelone de 1064 (ap. 2) et de 1131 (ap. 3) prévoyant tous les deux le statut de paix pour les voyageurs.
Il faut remarquer que le droit temporel a tendance à abstraire certains groupes protégés, en les qualifiant comme personnes qui sont « chemin faisant », alors voyageurs, commerçants et, certainement, les pèlerins qui utilisent les chemins publiques qui relèvent donc de la paix du seigneur.
11. Immunité des pèlerins ancrée dans le droit canonique (CIC)
Dans le Décret de Gratien (1140) il y a question de la possibilité d’application de l’excommunication pour le vol des pèlerins29. Les Décrétales de Grégoire IX faisant partie du Corpus Iuris Canonici (CIC) institutionnalisent ce statut protégé des pèlerins. Dans le titre XXXIV « De Treuga et Pace » les décisions du concile de Latran III de 1179 sont reproduites. Le chapitre II nous intéresse pour le sujet des pèlerins30 ; celui-ci exprime :
« Innovamus autem, ut presbyteri, (clerici), monachi, conversi, peregrini, mercatores, rustici, euntes et redeuntes, et in agricultura existentes, et animalia, quibus arant et quae semina portant ad agrum, congrua securitate laetentur. »
Nous sommes ainsi arrivés à une institutionnalisation, à une « normativité » de la Paix de Dieu protégeant les pèlerins, à côté d’autres groupes tels que les inermes, les paysans, les commerçants et les étrangers. Les canonistes distinguent entre treuga perpetua et treuga temporalis.
Bernard de Pavie, dans son commentaire de la décrétale d’Alexandre III, dédie tout un paragraphe à la Pax Dei. Le Decretalium (1191-1198) différencie entre la treuga perpetua et la treuga temporalis. Pendant que la treuga perpetua englobe certains groupes de la société, dignes d’être protégés à cause de leur faiblesse envers les milites, la treuga temporalis poursuit le but de n’apaiser que certaines périodes31. L'évolution nous montre que le droit canon a reçu des canons la protection des pèlerins, et continue cette tradition. Les canonistes maintenant la différence entre paix générale et temporelle ou particulière n'avaient pas non plus « oublié » les pèlerins, eux en danger en faisant chemin jusqu'à leur arrivée aux lieux de pèlerinage.
12. La Paix de Dieu en faveur des pèlerins : défense de ses propres adversaires ?
Le second concile de Latran de 1139 condamnait les incendiaires et leurs complices à un pèlerinage d’une année soit à Jérusalem32, soit en Espagne. Les juges belges ordonnaient les délinquants aux lieux suivants: Ghadelour en Navarre, Notre-Dame de Roncevaux, en Asturie, Aragon. En Galice notamment Sainte Marthe d'Ortiguera, la clausa de Saint Guillaume de Finisterre, Notre-Dame de Finisterre, Saint-Jacques de Compostelle et Padron33.
L’acte contre les incendiaires de Frédéric I (1186) octroyait aussi le pèlerinage à Jérusalem ou à Saint Jacques de Compostelle en tant que sanction34.
Or, une fois acquis le statut d’un pèlerin, ces criminels bénéficiaient bien d’une protection. Un vrai abus du statut et de l’immunité ?
Les deux actes cités supra reprennent seulement ce qu’ont fixé les autres. Le concile de Clermont de 1130, pour l’incendie, fait suivre également le châtiment du pèlerinage à Saint Jacques. Le contenu du concile de Clermont de 1130 finit par faire autorité puisqu’il fut intégré au CIC35. Sur le fond, il n’y a pas de différences à constater entre les versions des règles de la Treuga du concile de Latran III et celle du CIC, c’est-à-dire le titre XXXIV sur « De Treuga et Pace » des Décrétales de Grégoire IX, lib. I.
La protection des pèlerins fut donc reçue dans les Décrétales de Grégoire IX par Latran II (de 1139), le concile de Reims (1148) et de Tours (1163) et Latran III (1179).
Il faut donc distinguer deux catégories de pèlerins, les pèlerins volontaires et les involontaires ; les derniers subissent un pèlerinage punitif et repressif (Strafwallfahrt). Ils s’équipaient des mêmes outillés : sac, calebasse, bâton, lettre de recommandation, coquillage et manteau 36.
Conclusion
En guise d’observations finales, nous pouvons retenir qu’il faut toujours distinguer le type de pèlerins en question.
En tant que délinquants et condamnés à pérégriner, les pèlerins étaient très libres, liberté dont quelques-uns ont su bien profiter 37. Par rapport aux pèlerins volontaires et aux autres délinquants, ils étaient même favorisés.
Recibido el 13 de marzo de 2015 y aceptado el 20 de marzo de 2015.
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* Der Autor hat an der European University for Economics and Management (eufom) in Luxemburg die Professur inne für Internationales und vergleichendes Zivil- und Wirtschaftsrecht mit Immaterialgüterrecht/Recht des Geistigen Eigentums, verbunden mit der Direktion des dortigen Forschungsschwerpunktes für Immaterielle Wirtschaftsgüter und Geistiges Eigentum. Er ist zudem Sachverständiger für ausländisches Recht bei Gerichten, Notariaten und Kammern. E-Post-Adresse: thomas.gergen@eufom.lu.
Les références
1 Hoffmann, p. 48, 68, 96, 102.
2 Bronisch, p. 37; Wohlhaupter, p. 370; Hoffmann, p. 4.
3 Gergen, Paix et Trêve, passim.
4 Hoffmann, p. 48, 68, 96, 102.
5 Ohler, p. 178.
6 Rovira i Ermengol, Usatge LV ; Bastardas i Parera (éd.), Usatge 60 ; Kagay, p. 78.
7 Hoffmann, p. 84, 227.
8 Ohler, p. 58.
9 Liber, chap. VI, fol. 3 ; Maes, p. 116 ; Herbers, passim ; Gergen, Lusorama, 1999, p. 82-83.
10 Lambertus, Dei miseratione atrebatensis episcopus, honorabili dominae suae Clementiae, Flandrensium comitissae, salutem et obsequium cum orationibus. Nobilitati vestrae, notum fieri volumus quosdam « peregrinos » parochianos nostros Roma venientes omnes extraneas terras quiete transisse. Tandem in vestra terra pervenientes a praeposito vestro G. apud Batpalmas depraedati sunt. Nos vero ministerium quod ad nos pertinet facere volentes, mandavimus ei ut libere vel per fidejussionem quod injuste in pace abstulerat redderet. Illum hoc facere renuentem in Coena Domini excommunicavimus. Nunc autem misericordiam vestram exoramus ut secundum pacem istiusmodi hominem tractetis et « peregrinis » sua reddi faciatis. Quod si redditum non fuerit, nos statuta pacis mutare non valentes, totum castrum in quo hoc facinus et alia multa facinora acta sunt in bannum mittemus. Vale. J. P. Migne, P. L., 162, col. 659, epistola XXXI (Lamberti ad clementiam Flandriae comitissam).
11 Hoffmann, p. 151.
12 Eo videlicet modo, ut nemo, nisi clericus, aut pauper mendicans, aut peregrinus adveniens, aut infans a bimatu et infra, in toto Lemovicino sepeliatur, nec in alium episcopatum ad sepeliendum portetur. Cf. Mansi, XIX, col. 541.
13 Huberti, p. 391-393.
14 P. L. 161, col. 1237-1238.
15 Hoffmann, p. 219.
16 Haskins, p. 283 ; Hoffmann, p. 173. Une étude sur la protection des commerçants reste à faire. Il serait utile d'en avoir une qui analyse le rapport entre le statut de paix pour les commerçants dans de nombreuses Trêves de Dieu et l'application du droit romain au XIIe et XIIIe siècles, cf. Carlin, p. 209.
17 Hoffmann, p. 187.
18 P.L. 182, 928, ep. 363, col. 565 suiv.
19 Hoffmann, p. 223, 227.
20 Par rapport aux « sagreres » et « XXX pas », cf. Gergen, Texttradition, p. 257-277.
21 Huberti, p. 478.
22 Huberti, p. 478-479.
23 Huberti, p. 491.
24 Huberti, p. 492.
25 Graboïs, p. 494-495 ; Huberti, p. 540-541.
26 Mansi, 21, 843 suiv. ; Hoffmann, 194 ; Huberti, p. 453-454.
27 Huberti, p. 507-508.
28 Kagay, p. 78.
29 Hoffmann, p. 232.
30 Corpus Iuris Canonici 203.
31 Hoffmann, p. 236.
32 Voir sur le pèlerinage à Jérusalem : Hoffmann 84, 139, 211, 259. Il est mentionné, au concile de Vich (1033), bannissement. On a considéré que la défense de Cluny ou la participation aux batailles contre Henri IV vaut tant que la lutte contre les sarrasins à Jérusalem ; Adémar parle aussi de Jérusalem.
33 Le distichon était le suivant : « Quen va Santiago e non va a Padron / O faz romeria o non ». Maes, p. 104 ; VieIliard, p. 138, n. 6.
34 Ohler, p. 58.
35 Gonzalvo i Bou, p. 44.
36 Maes, p. 108.
37 Maes, p. 113.
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